Le mois de Ramadan est à son début. 30 jours de vie au ralenti pour une Tunisie qui n’a toujours pas trouvé son rythme de croisière.
Côté administrations, c’est un laisser-aller aussi habituel que dangereux qui prime.
Fonctionnaires absents ou en retard, service mou et rendement frôlant le zéro pour cent. Kamel Ayadi n’y pourra rien. La paresse en pareille saison est régulière et la conscience citoyenne, notion à l’intensité occasionnelle.
Les paroles du ministre de la Fonction publique, de la gouvernance et de la lutte contre la corruption ne seront qu’un tour de communication verbale plus ou moins bien assuré, les mauvaises habitudes ont l’ancrage bien profond.
Du côté des banques, c’est vers 12H45 que le travail s’arrête. Le labeur de nos banquiers se résume à une moyenne de 5 heures par jour au maximum. Après cela le service s’arrête. Soit près de 5 heures avant la rupture du Jeûne; n’est-ce pas abusé? Le temps de faire un tour au marché, une sieste, une pause télé plus longue, elle, que la journée de travail.
Tunis en mode Ramadan, c’est des routes vides le matin et désertiques l’après-midi. Drôle de parenthèse hors du temps pour un pays qui tente de se relever dans la douleur. Le dinar est à son taux le plus bas. Les signaux économiques sont au rouge. La relance est pénible. Le tunnel est long et le bout invisible encore. Et pourtant la Tunisie s’offre des vacances « pieuses ».
C’est vrai qu’il nous faut prier pour nous en sortir!
Même en politique, le flou est dramatique. Un appel à un gouvernement d’union nationale lancé par le président de la République et un brouhaha en écho. Entre ceux qui se voient déjà à la tête de ce gouvernement, ceux qui veulent parasiter le message, ceux qui ne l’ont pas compris et ceux qui l’applaudissent, le Tunisien est on ne peut plus blasé. Au diable, les politiciens et vive la télé!
Tel est le slogan de la conjoncture! A vos écrans, vite partez! C’est la course à qui regardera le plus de feuilletons télévisés. C’est haletant, dégoûté, dépité qu’on le retrouve le soir, ce Tunisien-téléspectateur-internaute, accessoirement citoyen.
Il crie sa rage sur les réseaux sociaux contre des émissions qu’il regardera, religieusement, trente jours durant. Il pleure les millions de dinars déboursés pour une production télévisée très en-deça des standards minimaux. Il râle, il insulte, il jure ses grands dieux qu’il ne se laissera plus piéger et il reviendra à sa télécommande, entre deux posts Facebook, regarder la médiocrité… pour la dénoncer ensuite.
Médiocrité quand tu nous tiens! Et elle nous tient! Elle s’accroche à nous comme à elle nous nous accrochons. Nous en sommes gavés régulièrement, persuadés pourtant que nous méritons mieux.
Mais dans la logique des choses faisant qu’en l’absence de créativité, le prosaïque devienne la norme, nos écrans ne font que nous renvoyer notre propre image. La violence verbale, la goujaterie, l’incivisme et toutes les autres tares sociales, c’est un diagnostic triste mais bien à nous.
Notre situation économique alarmante, elle est à l’image de notre paresse collective, de notre conscience endormie, de notre zèle dans l’absence de zèle. Notre politique chancelante, elle est à l’image de nos choix.
Qu’avons-nous d’autre à faire à part prier que cela s’arrête, et nous dire que nous sommes en 1437 (année de l’hégire). Nous aurons l’impression d’être plus dans l’ère du temps, un certain temps…pas celui de l’avenir, indubitablement.
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