Trois ans de Moncef Marzouki : le bilan est sans appel. Les bourdes du président tunisien, répertoriées dans des articles de presse, rappelées dans des interviews et déclarations diverses, transcrites dans des livres, en sont devenues de l’ordre de l’anthologique. Dans la tradition des articles de fin d’année listant les pires et les meilleurs, voici une liste non exhaustive, cela va sans dire, des bourdes royales d’un président candidat à sa propre succession :
Meilleure réplique : Incontestablement, sa théorie de la chaussure et des chaussettes aura été un des moments forts de la République et un des plus grands fous rires qu’a connus le Tunisien, pendant ces trois ans de perles. Un réquisitoire sur l’inégalité sociale se basant sur la parabole de la chaussure et des chaussettes et raisonnant autour de la question fatidique : « Lequel de ces accessoires acheter en priorité » ! Marzouki a beau simplifier, ses idées dépassent, des fois, l’entendement et surpassent les vannes des meilleurs des humoristes.
Meilleur costume : Le choix est difficile ! Nous avons longuement hésité entre le burnous, la kachabia ou le chapeau de paille. Des costumes traditionnels faisant notre patrimoine culturel, mais qui ont été instrumentalisés à des fins politiques et populistes. Comme François Hollande, Moncef Marzouki cherchait à être un président normal, il aura été le plus extravagant de tous (après François Hollande en costume Kazakh, évidemment).
Meilleur accessoire : La cravate. Blacklistée par le président sortant qui s’était visiblement promis de ne jamais en mettre, Marzouki en portera pourtant dimanche dernier lors d’un meeting populaire. Une jeune fille est montée sur scène et lui en a mis une autour du cou. C’est le début d’une trêve entre ce candidat à la présidentielle et le bout de tissu qui rapporterait des voix (la phrase est évidemment de lui).
Meilleure tragédie : Jouée, par procuration, par son responsable de campagne Adnène Mansar. Elle pourrait viser l’électorat d’Ennahdha ayant connu les geôles de Ben Ali et pouvant faire la différence dans l’urne en ce scrutin qu’on dit serré. M.Mansar présent sur un plateau a, ainsi, fondu en larmes, mais à sec. Se remémorant un souvenir proche avec sa fille, il n’a pas pu retenir ses larmes. « Papa, allons-nous revenir en prison ? » l’aurait-elle interrogé. Emouvant en effet, sauf que, de la prison, Mansar n’en a jamais fait !
Meilleure comédie : « On nous a volé les graines ! Que ferons-nous en cas de guerre pour nourrir notre peuple ? Nous devons retrouver les graines ! ». Non ce n’est pas une réplique tirée d’une pièce de théâtre surréaliste. C’est une réplique surréaliste comme seul Moncef Marzouki sait en faire. Celui qui improvisait les discours, en avait produit des répliques allant tout droit dans les annales.
Meilleur but : Lors d’un match joué dans l’après-midi du 14 décembre on aura vu un Moncef Marzouki sportif et débordant d’énergie narguant son adversaire politique BCE critiqué par ses détracteurs pour son âge avancé. Toutefois, perdu sur le terrain comme un gosse ayant perdu ses parents, il prend le ballon à pleines mains et marque. Ses coéquipiers sont fiers de lui. Peut-être avaient-ils perdu leurs lunettes ! (vidéo)
Meilleure imitation : faire le chat en plein meeting : Fait! N’avait-il pas imité aussi Ben Ali, à merveille, sur un plateau télévisé? Moncef Marzouki, président de tous les défis, même les plus ridicules !
Meilleur moyen de régner : Diviser ! Moncef Marzouki a commencé cette démarche dès son discours d’investiture prononcé à l’Assemblée nationale. A travers une volonté affichée d’unir, le président Marzouki n’a fait que marquer une scission qu’il continue trois ans après à confirmer. La clé de son discours étant l’expression d’une dichotomie entre « nous » et « eux », les bourgeois et le peuple, les révolutionnaires et les sbires, les voilées et les « séfirates » (termes désignant les femmes non voilées)… La stigmatisation, rien de mieux pour diviser et grignoter un semblant de popularité réconfortante.
Pire silence : il y en a incontestablement plus d’un. Nous aura marqués le silence du droit de l’hommiste Moncef Marzouki quand des manifestants ont été tirés à la chevrotine et agressés un certain 9 avril. Quant à sa passivité face à l’extradition du libyen Baghdadi Mahmoudi qui s’était réfugié en Tunisie, nul besoin de la rappeler, ce fait a marqué l’entrée de Moncef Marzouki dans l’Histoire, par sa plus petite porte.
Pire caprice : Démettre le gouverneur de la Banque centrale de ses fonctions alors que le pays était en pleine convulsion économique, Moncef Marzouki l’a fait ! Derrière ce limogeage, une raison toute banale : rendre à Hamadi Jebali la monnaie de sa pièce. Non informé par l’extradition de Baghdadi Mahmoudi, Moncef Marzouki a pris cette décision fort contestée, unilatéralement, en réplique à ce qu’il avait alors vécu comme un affront, dira-t-on donc.
Pire mensonge : « Je n’ai jamais porté plainte contre un journaliste ! ». Les faits sont pourtant là et Business News en connait quelque chose. Notre confrère Zouhair El Jiss aussi. Les plaintes que Moncef Marzouki ne porte pas, le sont par ses acolytes ou au nom de la présidence de la République. Son capital sympathie est-il préservé pour autant ? Possible… Encore faut-il qu’il lui en ait resté un peu!
Pire justification : Garder, en prison, un Tunisien incarcéré pour ses idées afin de garantir sa sécurité. Fait assumé par Moncef Marzouki qui l’a déclaré lors d’une conférence tenue dans le cadre du Conseil des Relations étrangères américain. Jabeur Mejri, emprisonné pour avoir partagé des caricatures du prophète sur son profil Facebook, ne pouvait donc être libéré, selon la logique présidentielle, car il y avait beaucoup de salafistes violents en Tunisie. Sacré raisonnement !
Pire contradiction : Celui qui critique les médias de la honte, ceux n’ayant pas critiqué Ben Ali, s’est entouré en toute béatitude, de pseudo-journalistes rédacteurs vantant ses mérites à longueur d’articles quasi publicitaires. Quant à ceux qui le critiquent, ils seront attaqués, dénigrés, diabolisés par Marzouki et ses admirateurs. Sauf que le problème avec les adeptes de Moncef Marzouki qui critiquent ceux qui le critiquent et les assimilent, par raccourci, à des laudateurs de BCE, c’est qu’ils semblent ne pas voir qu’ils sont devenus « plus laudateurs que les pires laudateurs de Ben Ali »!
Pire argument de com : Pour sa campagne à la présidentielle, Marzouki a utilisé à deux reprises voire plus des enfants. Mêler l’image d’enfants à la politique n’est-ce pas trop facile comme argument de com ? C’est surtout très juvénile, comme technique de vente ! Nous l’avons vu hier fêter, chez elle, l’anniversaire d’une fillette. « La gamine de trois ans l’a elle-même invité! Pouvait-il refuser ? », répliqueront probablement ses souteneurs. La page de Moncef Marzouki partagera des photos de la fête familiale, des ballons et des chapeaux de couleur. Mais la question est « y avait-il un clown à l’anniversaire ? »
Pire insulte : « J’apprendrai à votre président à saluer », nous a lancé un cheikh du Golfe. Traité de goujat, Marzouki avait pourtant souri ! Ca doit être drôle d’être le François Pignon de quelqu’un ! Jubilatoire doit être donc le fait de l’être pour des millions de Tunisiens, tellement jubilatoire qu’on y prend goût et qu’on voudrait que cela recommence… pas pour une année, pas pour trois mais pour cinq! Merci, président, nous avons assez ri !
Se voulant président normal, Moncef Marzouki est tombé à plusieurs reprises dans le grotesque. Il en est devenu la risée de son propre peuple. De ce peuple, nous n’occulterons, cependant, pas ceux qui ne voient en les déboires de leur candidat favori qu’un apprentissage difficile de l’exercice du pouvoir. Un exercice ne pouvant être évalué qu’à la suite de 5 ans de plus, à la tête de la Tunisie. La majorité dira le 21 décembre 2014 si elle accepte d’être le cobaye de ce médecin à la reconversion improbable mais qui nous aura, en revanche, bien fait rire. De ses meilleures bourdes, n’avait-on pas tiré les meilleures blagues ? Tirons donc notre chapeau, à celui qui tirera, probablement, sa révérence dans 5 jours!
*Traiter le meilleur du pire du président sortant n’entend en aucun cas qu’il y ait éloge sous-jacent de son adversaire politique. Nous ne dirons pas, que de celui-ci, il n’y a eu que du meilleur, mais que celui-ci se place, pour beaucoup de personnes non emportées par la ferveur partisane, comme le meilleur choix du pire. Face à ce dilemme, souhaitons « bon vote » (surtout pour les moins convaincus par l’un et l’autre candidats) et que le meilleur gagne !
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